Gênée par l’odeur de la cigarette qui la prend au nez et à la gorge, Eva ne peut s’empêcher de tousser, un peu vivement qui plus est. Aussitôt, elle sent ses yeux rougir et piquer, certainement la fumée encore une fois. Chez elle, on a banni la cigarette, et la jolie blonde n’en a guère l’habitude. Cela dit, elle relève les yeux pour voir la jeune femme qu’elle sent se lever et se rapprocher d’elle. Ce n’est seulement que là qu’elle la reconnaît. Parker Warner gère avec son frère le coffee shop de la ville. Eva y est déjà allée plusieurs fois. Pourtant pas très fan de café, elle est, par contre, une grande consommatrice de pâtisseries (a) Surtout celles à la française ! Un véritable délice.

Oui, je crois que oui.

Murmure-t-elle, en reprenant une profonde inspiration. Elle pose alors brièvement le regard sur la main que la jeune femme a posée sur elle, avant de relever lentement la tête vers Parker. Elle était jolie, mais ça, Eva l’avait déjà remarqué il y a bien longtemps maintenant. Bien embêtée de cette introduction des plus catastrophiques, la blonde esquisse un petit sourire gêné, en repassant à nouveau une main dans sa chevelure, pour dégager les mèches qui lui barraient les yeux, et l’empêchaient de voir correctement.

Je suis désolée, je ne voulais pas te surprendre !...

C’est juste que la cigarette…

Explique Eva, dans un sourire vraiment désolé. Elle qui voulait passer inaperçue, et repartir sans déranger, ça avait été complètement raté. En plus, elle n’aime guère attirer l’attention et l’intérêt que lui porte Parker, pourtant anodin, la gênerait presque. D’ailleurs, ses joues rougissent légèrement, mais on mettra ça sur le compte du vent glacial qui vient s'échouer sur leurs deux silhouettes.

Eva se sent terriblement gênée d’avoir interrompu Parker de la sorte. Elle ne voulait pas la surprendre, et encore moins la déranger. Elle n’avait pu contenir cette toux qui était survenue brusquement après qu’elle ait respiré la fumée de sa cigarette. Ses yeux étaient même devenus un peu rouges. Ce qui la gêne encore un peu davantage, c’est que la jeune femme à ses côtés semble s’inquiéter, et pas qu’un peu. L’intérêt qu’elle lui porte, pourtant banal, et anodin, fait naître en elle une certaine timidité. D’abord, Eva prend soin de la rassurer, avant de se murer dans un silence à nouveau. Ça n’était pas une grande bavarde, et encore moins avec les gens qu’elle ne connaissait pas beaucoup. Les joues légèrement rougies, la blondinette préfère détourner le regard et voit alors le mégot tomber des doigts de Parker pour rouler lentement sur le bois du ponton, avant de s’éteindre. Gentille attention.

Il ne fallait pas… !

Mais, merci.

Souffle doucement la fille du maire, en relevant légèrement la tête, pour gratifier Parker d’un sourire. Celle-ci reprend soudainement la parole, pour faire la conversation. Aussitôt, Eva hausse timidement les épaules. Elle ne sait pas quoi répondre à la question de la jeune femme, du moins, elle ne sait pas quoi répondre d’intelligent ! Toujours cette fichue et désagréable sensation de ne rien avoir d’intéressant à dire.

Je me baladais…

Murmure Eva, avant de relever soudainement les yeux vers le ciel, qui s’était mis à gronder. A peine a-t-elle le temps de grimacer que des trombes d’eau se mettent à tomber. Eva étouffe un cri de surprise, avant de faire un signe bref de la tête en direction de Parker :

Viens !

Lance-t-elle, avant de se mettre à courir, pour se réfugier dans le renfoncement d’une petite butte, formant une sorte de grotte, dans laquelle elle avait l’habitude de jouer petite. Elle est obligée de se baisser, d’ailleurs, pour y accéder, avant de s’asseoir à l’intérieur, légèrement tremblante. Ça n’aura pas servi à grand-chose : elle est déjà presque trempée.

Eva ne voulait vraiment pas déranger Parker, ou l’empêcher de fumer. Elle avait eu une réaction plutôt vive, mais après tout, elle n’aurait pas du s’approcher à ce point, aussi… ! Elle considère donc que c’est un peu de sa faute, et s’en veut vraiment d’avoir perturbé la fumeuse alors qu’elle était tranquillement installée. Elle aurait aimé la laisser en paix, mais avait tout fichu par terre, et se sentait réellement très embêtée. Attirer l’attention, déranger les gens, ce ne sont vraiment pas des habitudes de la jeune étudiante qui, même, en vérité, ne supporte pas ça.

Heureusement, elle est tombée sur une personne compréhensive… ! Celles et ceux qui sont durs avec elle la mettent souvent encore plus mal à l’aise. Là, c’est à peine si elle a rougi.

Soudainement, un grondement au-dessus de leurs têtes ramène Eva à la réalité et, très vite, la blonde part en courant, en indiquant à la brune de la suivre. Bien qu’elle ait trouvé un renfoncement dans lequel se mettre à l’abri, les deux jeunes femmes ont été trempées par la pluie. Recroquevillée sur elle-même, assise, Eva passe une main dans ses cheveux mouillés, pour les rabattre vers l’arrière, avant de sourire en entendant la réflexion de la jeune femme à ses côtés.

Je… Je ne bois jamais de café.

Avoue-t-elle, dans un petit sourire timide, en détournant le regard. Eva n’aime pas particulièrement parler d’elle, mais considère tout de même qu’elle doit faire la conversation, surtout qu’elles ne peuvent clairement pas faire autrement à présent. En attendant que l’averse passe, c’est en effet ce qu’il y a de mieux à faire.

Ce serait bien, oui. Mais à condition que ça ne t’embêtes pas… ?

S’inquiète immédiatement Eva. En effet, l’idéal pour elle serait de se sécher au plus vite : elle ne voudrait pas tomber malade… ! Cela dit, une fois de plus, elle a très peur de déranger !

Eva ne fait pas attention au regard de Parker qu’elle laisse pourtant traîner sur elle. La jeune femme essaie d’apprivoiser sa longue chevelure blonde, qui est maintenant trempée. Elle essaie, aussi, de rabattre ses jambes sur elle-même, pour se tenir un peu chaud. Et puis, elle tente également de lancer une sorte de conversation, considérant que si elles doivent rester dans cette sorte de petite « grotte » pendant un moment, il vaut mieux qu’elles fassent plus ample connaissance. A Great Falls, tout le monde se connaît mais, finalement, personne ne connaît « vraiment » personne. Du moins, c’est parfois l’impression qu’a la jeune femme. On ne cherche plus à se faire une idée des gens, on s’arrête juste à l’image qu’ils renvoient, ou à ce qu’on entend dire sur eux. C’est nettement plus commode. Mais bien dommage, en même temps…

J’adore ça, surtout le « fait maison ».

Avoue Eva, se sentant un peu gamine en lui confiant cela. En effet, à son âge, la jeune femme pourrait boire du café, tout de même ! Mais elle n’a jamais aimé ça. C’est trop amer, et le goût n’est pas agréable en bouche. En plus, cela ne l’a jamais aidée à se tenir éveillée. Alors, non, l’étudiante n’en voit pas l’intérêt. C’est comme la cigarette. Et puis, son père la tuerait, s’il la voyait une clope au bec.

Le sourire de Parker est communicatif, puisque la blonde en esquisse un à son tour, contente de la gentille proposition de la jeune femme. On ne rencontre pas des personnes aussi aimables tous les jours ! Et l’idée de pouvoir se sécher avant de rentrer donne même davantage chaud à Eva qui, pourtant, frissonnait quelque peu à cause du vent qui s’engouffrait dans la grotte.

Un silence s’installe, mais pas désagréable. Il est de ceux qui vous permettent d’écouter attentivement les bruits de Mère Nature. C’est vrai que ça a un côté agréable, presque apaisant. Eva se surprend même à fermer les yeux un court instant, se sentant comme isolée du monde entier. Ça lui plairait, ça. Être mise à l’écart, et être seule avec elle-même. Ce n’est pas quelque chose qui l’effraie.

Moi aussi.

Répond simplement la blonde, dans un murmure très doux.

Eva est pourtant trempée jusqu’aux os, mais elle se sent en sécurité dans cet endroit, avec Parker. La jeune femme l’intimide un peu, c’est vrai, mais elle ne se sent pas mal à l’aise non plus. C’est agréable. Tout comme le bruit de la pluie, cette douce odeur d’herbe mouillée qui vient à ses narines. A l’idée de boire un chocolat bien chaud, la blonde ne peut qu’esquisser un sourire absolument radieux. Ça lui fait déjà terriblement envie.

Avec plaisir !

Répond elle, d’un air enthousiaste, bien qu’elle n’ait pas élevé la voix. Eva était toujours très douce dans sa manière de parler, comme de bouger. Elle était gracieuse, absolument pas brutale. Sa sœur était bien différente, d’ailleurs. Toujours pour attirer l’attention, elle parlait fort, et avec les mains. Eva, à côté d’elle, pouvait presque devenir invisible ! Et ça lui convenait très bien. Ne pas attirer les regards, passer inaperçue, ça ne la dérangeait pas, au contraire. C’est ce qui la mettait à l’aise.

Lorsqu’elle voit Parker lui tendre sa grosse écharpe, Eva relève les yeux pour la fixer un court instant. Elle ne peut qu’apprécier ce geste aimable et généreux. Elle ne peut pas refuser, et finit par accepter, en la serrant d’abord entre ses deux mains, avant de l’enrouler soigneusement autour de son cou.

Merci.

Murmure-t-elle doucement, avant que Parker ne reprenne la parole. La pluie semble l’inspirer. Elle trouve des mots absolument touchants pour s’exprimer et Eva boit chacun de ses dires. Elle ne la trouve pas stupide, au contraire. Elle la regarde avec de grands yeux admiratifs, tandis que son récit lui fait revenir un souvenir en mémoire, dont elle ose parler, bien qu’elle n’aime pas spécialement discuter d’elle.

Je me souviens, je devais avoir 6 ou 7 ans, mon père m’avait emmené avec lui cueillir des champignons dans les bois. Il y avait eu cette averse absolument énorme, on était trempé. Dès qu’on est rentré à la maison, il est allé me chercher une énorme couverture bien chaude. Je me suis installée près du feu, et il est réapparu avec deux bols énormes remplis de chocolat chaud. C’est vrai que c’était parfait, je crois que j’oublierai jamais ce moment. Après, ma mère est arrivée et nous a disputés parce qu’on avait sali l’entrée avec nos bottes pleines de boue !... Mais on s'en fichait.

Il était rare qu’Eva se confie d’une manière spontanée. Mais comme ce souvenir lui était revenu en mémoire, elle avait eu envie de le partager. Et puis, c’est anodin, ça n’est pas trop personnel non plus… ! Même si elle a très envie de faire confiance à Parker, la jeune femme a besoin de plus de temps pour s’ouvrir davantage. Mais c’est déjà pas mal. Comme le fait qu’elle se sente aussi à l’aise, ou qu’elle ait accepté son écharpe. C’est beaucoup pour Eva. La jeune femme, très timide, aurait pu refuser le vêtement, ou se murer dans un silence pesant. Mais non. Elle se sentait bien.

D’ailleurs, elle répond dans un sourire à son interlocutrice :

Oui, il compte énormément pour moi.

Son attention est de nouveau complètement alpaguée par Parker, quand elle reprend la parole, partageant un souvenir à son tour. Quand elle parle de sa mère, Eva perd doucement le sourire. Elle sait. Tout le monde sait, à Great Falls. La mort de Sofia Warner avait fait le tour de la ville. Ça avait été si triste, si brutal. Eva s’en souvient. Pourtant, elle était petite, mais ça l’avait marquée. A Great Falls, personne ne décédait, sauf de vieillesse, ou des suites d’une maladie ! Jamais d’une façon aussi brusque, et choquante.

Comme elle avait les yeux rivés sur elle, Eva ne peut que voir les larmes qui roulent lentement le long de ses joues. Dès qu’elle vient poser un regard timide sur elle, l’étudiante a le réflexe de tendre le bras, pour poser sa main dans le dos de la pâtissière. Elle esquisse un sourire à son tour, bien que de la voir pleurer lui remue l’estomac, et pourrait lui faire monter les larmes aux yeux également.

Je me souviens de ta mère.

Elle était vraiment très belle.

Murmure doucement Eva, avant de tourner la tête pour ajouter, tout à fait timidement :

Tu as le même sourire qu’elle.

Quelque part, la conversation qui s’est installée entre Parker et Eva est comme le bruit de la pluie qui tombe : apaisante. En effet, les deux jeunes femmes discutent de choses qui ne sont pas si anodines que ça, au fond, surtout quand la belle brune parle de sa mère. Petite, Eva avait été choquée par l’accident qui avait emporté Sofia Warner. Elle se souvient avoir pensé que cela aurait pu arriver à sa propre mère, et cette idée l’avait travaillée quelques jours, semaines peut-être. On pense toujours que ça n’arrive qu’aux autres mais quand ça arrive à quelqu’un qu’on croise tous les jours, ça vous ramène à la réalité. Et cette terrible nouvelle avait secoué la ville toute entière.

Gentiment, et simplement pour montrer qu’elle est « là », la belle blonde tend le bras pour poser sa main, à plat, dans le dos de Parker. Ce n’est pas grand-chose, c’est un geste simple. Et pourtant, elle transmet beaucoup de tendresse et de douceur à travers la chaleur qui se diffuse de sa paume au vêtement de Parker. Elle n’aime pas la voir pleurer, elle est elle-même très émue mais elle sait que ce n’est pas du désespoir dans les yeux de la pâtissière, juste une profonde nostalgie et, évidemment, de la tristesse aussi.

Eva esquisse un sourire à la remarque de Parker puis détourne le regard, pour faire un commentaire, un peu timidement cela dit. Aussitôt, elle sent son regard se poser sur elle, un regard qui l’appelle. Eva tourne la tête à nouveau et se prend de plein fouet toute la gratitude de Parker. Elle est elle-même surprise, un peu déstabilisée d’abord, puis esquisse un léger sourire ensuite, contente de lui avoir fait plaisir. Elle ne reprend qu’après avoir dévisagé la jeune femme un court instant.

Je suis étonnée qu’on ne te l’ait pas fait plus tôt.

Parce que c’est flagrant.

Ajoute-t-elle, en retirant doucement sa main, pour la passer dans ses cheveux, encore humides. Ce moment qu’elles étaient en train de partager, c’était intense. Inexplicablement intense. Et Eva le sentait.

Eva n’avait pas franchement prévu tout ce qui venait de se passer. Les larmes de Parker l’ont beaucoup émue, mais elle a, en même temps, vraiment apprécié cette conversation, pourtant troublante en un sens. Elles viennent d’échanger, de partager pas mal de choses, et ça, finalement, ça ne peut qu’intriguer l’étudiante. En même temps, elle est très touchée. Ce moment aura été intense. Peut-être qu’il y en aura d’autres ? Allez savoir. Ce n’est peut-être du qu’à la pluie, à cette grotte, à ces souvenirs… Eva n’en sait rien, mais n’a finalement aucun regret d’avoir dérangé Parker sur le ponton.

Je t’en prie.

Répond gentiment et poliment Eva, en esquissant un léger sourire, un peu perturbée par le regard de Parker, toujours posé sur elle. Ça avait quelque chose de déstabilisant mais, en même temps, ça n’était pas désagréable. La jeune femme, peu confiante, espérait que la pâtissière l’appréciait. Elle n’aurait pas aimé qu’il n’en soit pas ainsi. Sans doute parce qu’elle, elle l’aimait bien.

A sa remarque sur son écharpe, Eva part légèrement à rire, en passant ses deux mains dessus. Elle était un peu humide, mais très douce. Depuis que la blonde l’avait passée autour de son cou, elle n’avait plus eu de frissons.

Merci ! J’ai moins froid, en tout cas.

Eva aurait pu ajouter qu’elle aimait l’odeur de ce vêtement mais garde finalement le silence, et pose son regard droit devant elle. C’est là qu’elle remarque qu’il ne pleut plus. Elle n’y avait pas fait attention.

Oh !... L’averse s’est arrêtée. On devrait en profiter pour filer, non ?

Demande-t-elle, en posant à nouveau son regard sur la jolie brune.

Eva aurait aimé dire à Parker que si elle voulait récupérer son écharpe, il ne fallait pas qu’elle hésite à demander mais, bêtement, elle n’ose pas. Elle ne saurait même pas vraiment dire pourquoi. A la base, elle est si polie que ça aurait même du la déranger que d’accepter son offre ! Mais ça lui faisait envie. Et puis, maintenant qu’elle l’a autour de son cou, qu’elle a chaud, et qu’elle a l’impression de sentir drôlement bon, Eva n’a pas envie de s’en séparer. Alors, elle la garde, un peu égoïstement sans doute.

Comme la pluie vient de s’arrêter, il est temps de quitter les lieux. A Great Falls, le temps était parfois étrange. Il y avait souvent des petites accalmies entre deux averses et les habitants savaient en général à quoi s’en tenir. Il fallait profiter de ces moments pour sortir, ou se dépêcher de rentrer, parce que ça pouvait se remettre à tomber, d’un coup, sans prévenir, d’une minute à l’autre. Un grondement et hop ! Trempé-guené.

Une fois dehors, la brune lui lance un magnifique sourire, auquel Eva ne manque pas de répondre. Même si elle avait eu envie de l’ignorer, elle n’aurait pas pu. Parker a le sourire de sa mère, c’est incontestable, et la voir heureuse, surtout après un moment de pure émotion, ça ne peut que rassurer et combler l’étudiante à la fois. Ensemble, elles prennent le petit sentier emprunté par tous les habitants, pour quitter les lieux, et retourner en « ville » (enfin si on peut appeler ça comme ça !).

Je suis proche des deux, mais plus de mon père.

Avoue Eva, en passant une main dans ses cheveux. Avec la brise qui s’infiltrait sous sa chevelure mouillée, elle avait de nouveau un peu froid, mais n’ose pas en dire un mot, ne voulant pas que Parker se débarrasse d’un autre de ses vêtements par générosité.

C’est vraiment quelqu’un de bien. Je l’admire pour tout ce qu’il fait pour Great Falls.

Confie naturellement Eva qui ne cachait jamais son attachement vis-à-vis de son père. Elle aurait peut-être du, en fait, puisque, de ce fait, on la prenait très souvent pour une « fille à papa ».

Il était souvent arrivé qu’Eva se prenne des réflexions au sujet de son père. Déjà, ceux qui ne l’aimaient pas en tant que maire n’hésitaient pas à en faire voir de toutes les couleurs à la jeune femme ! Et puis, certains la trouvaient trop « fille à papa », et y allaient parfois de commentaires franchement désobligeants. La jeune femme, pourtant, maintenait férocement son opinion au sujet de son père. Elle trouvait que c’était un homme bien, toujours au service de cette petite ville, et prêt à la faire vivre longtemps. C’est un homme particulièrement investi et elle n’a pas honte de dire à quel point elle est fière de lui.

Heureusement, elle n’est pas tombée sur une personne qui la jugera à ce propos. Elle se sent vraiment à l’aise avec Parker, et en confiance. Celle-ci se montre encore une fois adorable en lui racontant une petite anecdote au sujet de l’ouverture du coffee shop. Eva esquisse aussitôt un sourire attendri, avant de voir la pâtissière passer juste devant elle, marchant à reculons pour pouvoir la regarder, avant de lui glisser une remarque, et pas n’importe laquelle. Aussitôt amusée, l’étudiante ne peut contenir un rire, spontané, et naturel, qui vient illuminer son visage. Elle rougit peut-être même un peu.

Ah oui ? x)

C’est gentil ! Je ne savais pas que j’étais « drôlement chou »… !

Dit-elle, pour reprendre ses termes. C’est vrai, ça lui fait tout drôle d’entendre de tels compliments, mais les mots choisis et sélectionnés par Parker l’amusent énormément, aussi. En la voyant justement se diriger dangereusement vers le caniveau plein d’eau, Eva a le réflexe de poser ses mains sur les deux bras de la belle brune, pour lui éviter de finir les deux pieds dans le conduit débordant d'eau de pluie.

Attention !

Eva ne peut que partir à rire en entendant la remarque de Parker. Ce n’était pas une chose qu’on lui disait tous les jours, qu’elle était drôlement « chou », et ça l’amuse beaucoup. En même temps, ça la flatte, et la jeune femme sent ses joues s’empourprer, un peu. Tout en regardant la brune marcher à reculons, elle finit pour lui répondre, complètement innocemment, sans se douter de l’intérêt qu’éprouve la pâtissière pour elle. En fait, Eva la trouve forcément très belle, vraiment très envoûtante aussi, mais elle est bien trop ignorante et candide pour réaliser qu’il se passe quelque chose, là, à l’instant. D’ailleurs, c’est avec innocence, encore une fois, qu’elle prend la remarque de Parker, en scotchant un court instant sur sa lèvre inférieure, qui a légèrement rougi après qu’elle se la soit mordue.

Ah… ?

Demande-t-elle, un peu bêtement. Elle s’interrogeait drôlement sur ce que la jolie brune pouvait penser d’elle. Comme elles ne se connaissaient pas beaucoup, elle se demandait comment Parker la percevait. Elle n’ose cependant pas le lui demander, et n’a, de toute manière, pas le temps de le faire, puisqu’elle pose ses deux mains sur ses bras, pour l’empêcher de finir les deux pieds dans l’eau.

Forcément, Parker s’arrête, et les deux jeunes femmes se retrouvent proches. A ce point que les joues de Parker rougissent et que, cette fois, la blonde réalise le trouble qu’elle ressent, et qui se lit aisément sur son visage. Là, pour la première fois, elle s’interroge sur ce qui est en train de se passer… puis s’enlève ces idées de la tête. N’importe quoi, elle doit rêver.

Je t’en prie.

Tu devrais marcher à côté de moi, ce serait moins dangereux x)

Eva esquisse un sourire, puis se remet à marcher, avant de tourner la tête en direction de Parker, pour s’assurer qu’elle a bien ré-emboîté le pas également.