22 heures 04. Eva est installée dans un bus qui est censée la déposer à Great Falls à 22 heures 02. Il a un léger retard, mais la blonde n’est pas pressée de rentrer chez elle. C’est un peu le problème ces derniers temps - sa vie de famille est un calvaire. En même temps, son après-midi à la fac n’a pas été une partie de plaisir non plus. Elle a dû courir de droite à gauche pour valider son inscription, rencontrer ses futurs professeurs, leur faire part de sa motivation. C’est pourtant un choix d’études qui l’attire, mais dernièrement, Eva a du mal à se concentrer sur ce genre de choses, elle ne voit plus son avenir comme avant. Elle a ce besoin maladif en elle, de vivre, de profiter. Ça ne lui était jamais arrivé avant. Comme si la drogue l’avait libérée.

Aujourd’hui, elle n’a rien consommé. C’est peut-être ce qui la met un peu sur les nerfs, ou alors c’est parce qu’elle a oublié son iPod chez elle, quoi qu’il en soit, elle se sent à fleur de peau. Aucune musique pour l’apaiser, ou pour faire taire le ronflement constant du moteur. Elle soupire, quand le conducteur – zélé – freine comme un dingue, plusieurs mètres avant l’arrêt de bus. C’est le terminus. Eva se lève de son siège, puis s’arrête net, en devinant des silhouettes sur le banc, dehors, et en reconnaissant Parker, avec une fille. Son cœur se tord. Ce n’est peut-être pas tant un restant de sentiments, mais plutôt une forme de jalousie. Même si elle n’était pas capable elle-même de vivre au grand jour son attirance pour la gente féminine, la photographe enviait la facilité qu’avait Parker à s’assumer pleinement. C’est peut-être ce qu’elle envie toujours.

Le bus s’arrête pour de bon, les portes s’ouvrent dans un grincement bruyant, et plutôt dérangeant. Eva porte un jean taille haute, pattes d’eph, et un petit débardeur léger, blanc, qui moule sa taille de guêpe. Ses cheveux blonds détachés, son sac en cuir marron, et ses chaussures compensées lui donnent une allure typique des seventies. Elle baisse timidement la tête, en descendant les marches du car, appréhendant difficilement la rencontre avec Parker. Brusquement, elle ressentirait presque l’envie de prendre quelque chose, pour se donner confiance, pour se sentir mieux dans sa peau… Ce besoin si soudain ne fait qu’augmenter cette sensation de malaise, qui s’insinue de plus en plus en elle. La blonde humecte ses lèvres, avant de relever la tête.

Lorsqu’elle relève la tête, le ventre noué par l’anxiété, Eva se rend compte qu’une fille – ou plutôt que la fille – lui fonce presque dessus. Les deux jeunes femmes échangent un bref regard, et s’écartent au dernier moment pour éviter la collision. L’inconnue a l’air triste, presque dévastée en fait. La fille du Maire ne l’a jamais vue en ville, elle ne doit sans doute pas vivre dans le coin. Des adieux déchirants peut-être ? Pour tout dire, la photographe ne s’interroge pas plus longuement sur la question, son attention se pose rapidement sur Parker. Celle-ci fait une quantité de signes à celle qui s’en va, ne remarquant même pas sa présence. Elle a l’air obnubilé, ailleurs. Quelque part, cela arrangerait presque Eva. Il faut dire qu’elle n’a pas besoin d’une confrontation difficile en ce moment. Elle accélère brièvement le pas, quand le car redémarre en trombes. Malgré le bruit rugissant du moteur, Eva entend distinctement la voix de Parker, et ses dires. Elle ralentit aussitôt la cadence, et regarde bêtement par-dessus son épaule, en se demandant si c’est bien à elle qu’elle s’adresse. A vrai dire, elle ne s’attendait pas à ce qu’elle soit si à l’aise en sa présence. Et pourtant… C’est bien elle qu’elle interroge ; il n’y a personne aux alentours.

La blonde s’arrête, le cœur serré. Elle se retourne ensuite en direction de la brune, et est perturbée de la voir sourire autant. Pourtant, elle ne cherche aucunement à se défiler, même si son éternelle timidité est en train de la rattraper à grands pas.

Je reviens de la fac… Je devais y aller, pour valider mon inscription, en année de spécialisation.

Réalisant qu’elle n’a même pas dit bonsoir à Parker, Eva se sent d’autant plus gênée. Elle passe une main dans ses cheveux, se rapproche même de quelques pas du banc sur lequel la brune est installée. Elle ne s’est pas montrée très polie et, du coup, cherche à se rattraper, en lui montrant de l’intérêt… même si ça n’est pas facile pour elle. Sa gorge se resserre :

Et toi ? Tu raccompagnais ta petite-amie ?

Eva est perturbée par le sourire constant qu’affiche Parker. Elle n’a pas encore remarqué son état d’ébriété, mais cela ne devrait pas tarder cela dit… !

Eva fronce légèrement les sourcils en entendant les propos de Parker. Sa facilité à s’exprimer, à sourire, a tendance à la perturber. La blonde ne s’attendait pas à devoir lui rendre des comptes qui plus est. Elle hausse timidement les épaules, en soufflant quelques mots, pour s’expliquer malgré tout.

J’ai traîné un peu.

Souffle-t-elle, sans évoquer le fait qu’elle n’avait pas envie de rentrer chez elle avant. En fait, à cette heure-ci, il y a de grandes chances pour que ses parents soient couchés, ou qu’ils aillent dormir tout prochainement. Elle n’aura donc pas à les supporter longtemps. Cela dit, ce n’est pas une information qu’elle se sent de partager avec la belle brune. Ça fait si longtemps qu’elles ne se sont pas parlées… Le ventre d’Eva est noué.

En photojournalisme…

Parker lui explique ensuite que la fille n’était qu’une amie, et pas sa petite-amie. Elle est apparemment canadienne. Attentive, Eva acquiesce doucement, sans pouvoir s’empêcher de froncer les sourcils devant l’attitude toujours très surprenante de Parker. Elle a l’air ailleurs. Haut perché, en fait. Sa dernière remarque achève de la mettre mal à l’aise, mais aussi de lui ouvrir les yeux. Parker n’est définitivement pas dans son état normal. Aurait-elle bu ? La photographe la dévisage un court instant, espérant pouvoir aussi bien lire en elle qu’elle y arrivait auparavant. Il y a des mois de ça en fait. C’est dingue comme le temps passe vite. La blonde se rapproche, doucement, et s’assoit, sur un coin du banc, en croisant les jambes. La bandoulière de son sac en cuir tombe de son épaule.

Vous avez fait la fête, ce soir ?

Demande-t-elle, en tournant la tête dans en direction de son ancienne amante, et en se mordant la lèvre inférieure. Elle est de plus en plus certaine que Parker a bu, mais n’ose cependant pas lui poser la question directement. Elle essaie donc de le faire d’une manière détournée… mais pas forcément très subtile. Eva en a conscience. Elle sourit.

La gestuelle, les dires, l’attitude de Parker tout entière ont tendance à troubler Eva, à soulever certaines questions de son côté. Elle ne les pose cependant pas à voix haute, mais répond plutôt aux interrogations de son interlocutrice. Elle lui fait part, d’ailleurs, de son choix de spécialisation. Un choix qui s’est imposé de lui-même. Vivre de ses expositions n’est pas toujours un mode de vie évident pour un artiste – surtout financièrement. La blonde a donc décidé de s’orienter vers le journalisme. Rien ne l’empêche d’exposer à côté de son activité professionnelle, quand l’inspiration sera là. Elle n'aura pas à subir de pression ainsi.

Mes œuvres ? Le terme est peut-être un peu exagéré… Murmure la blonde pour commencer, avant de secouer la tête. Non. Il m’arrive d’exposer, mais pas en ce moment.

Assise près de Parker, Eva lui pose une question quant à ce qu’elle a fait de sa soirée, persuadée que la jeune femme n’est pas sobre. Celle-ci ne cherche pas à s’en cacher d’ailleurs. En réponse, la photographe esquisse un sourire amusé, avant de faire preuve de franchise :

Pour ne rien te cacher, je m’en doutais un peu.

C’est peut-être ce qui a poussé la jeune femme à l’interpeller, et à engager la conversation. On ne le saura jamais, mais cette pensée traverse fatalement l’esprit de la photographe. Il faut dire que ça fait un bail qu’elles ne se sont pas parlées. Eva ne l’aurait pas mal pris, si Parker avait choisi de l’ignorer. Même si elles ont vécu de bons moments, elles sont aussi passées par des périodes plus noires. Peut-être des moments que la propriétaire du Coffee Shop préfèrerait oublier, qui sait.

Sentir le regard de Parker sur elle n’aide pas franchement Eva à se sentir plus à l’aise. Elle croise et décroise les jambes, fixe un point devant elle, puis un autre. Son regard ne se pose sur son interlocutrice qu’après avoir entendu ses dires. Elle acquiesce.

Ça fait longtemps.

C’est comme ça qu’elle se l’explique. Si elles avaient gardé contact, les choses auraient été différentes, sans doute. La question ne se pose pas, puisqu’elles n’en ont pas été capables. Cela aurait probablement été trop douloureux. L’étudiante ne préfère pas y songer.

Ça va aller, pour rentrer ?

Demande Eva, soudainement soucieuse.

D’accord…

Répond doucement Eva, bien que surprise. Pour tout dire, après tout le temps qui s’est écoulé, et la manière dont elles se sont quittées l’une et l’autre, la jeune femme n’avait pas du tout envisagé leurs retrouvailles de la sorte. Elle, elle se sent forcément nerveuse, et la façon qu’a Parker de sourire, de parler et d’agir, ne fait que l’intimider davantage. Très vite, elle comprend que la jeune femme n’est pas tout à fait dans son état normal. Du coup, elle ne sait pas si elle osera lui passer un coup de fil pour lui annoncer sa prochaine exposition. Ce que vous raconte une personne saoule est toujours à prendre avec des pincettes, non ?

Je m’en suis pas rendue compte tout de suite si ça peut te rassurer.

Lui glisse tout de même Eva, dans un sourire bienveillant. A première vue, on ne la prend pas pour une poivrote, loin de là (a) La blonde s’en est aperçue en discutant avec elle, surtout qu’elle ne s’attendait pas franchement à ce que la conversation soit si facile entre elles après tout ce temps. Enfin, c’est peut-être une bonne chose, finalement, que Parker ait abusé de la boisson. Tout est beaucoup plus simple de cette manière… ! Cela dit, la photographe s’inquiète tout de même un minimum. Elle demande à la jeune femme si elle se sent de rentrer jusqu’à chez elle. La réponse de Parker ne lui convient pas tellement – elle est toujours soucieuse.

Oh, je… je suis détendue.

Répond Eva, les sourcils imperceptiblement froncés, avant de baisser la tête, et de rougir légèrement. Confrontée à Parker, l’étudiante sent pourtant sa timidité revenir au galop. Et elle ne saurait expliquer pourquoi. Ses mains glissent nerveusement sur ses cuisses, elle ajoute :

Peut-être pas complètement, mais ça va.

Sourire forcé. La blonde change rapidement de sujet de discussion :

On habite quasiment en face l’une de l’autre, laisse-moi te raccompagner, j’ai pas envie de traîner ici ~

Explique Eva, en frissonnant légèrement. Elle a toujours été un peu frileuse.

Eva esquisse un bref sourire quand Parker lui indique qu’elle a ressenti son léger état de nervosité grâce à son sixième sens. C’est vrai, la photographe n’est pas très détendue. Elle aimerait l’être davantage, mais ça fait des siècles qu’elles ne se sont pas parlées – ou presque. Et cette situation la rend forcément très nerveuse. Dernièrement, qui plus est, la jeune femme aime avoir le contrôle, et elle a l’impression de l’avoir d’autant plus lorsqu’elle est sous influence, ce qui n’est pas le cas ce soir. Et cela lui manque. Ses gestes ne traduisent heureusement pas ce ressenti, qui plus est, Eva est préoccupée par l’état de Parker. Elle se demande comment cette dernière va pouvoir rentrer chez elle, surtout si elle est décidée à décuver sur ce banc.

Moi aussi j’en suis une.

Souffle Eva, dans un petit sourire, histoire de montrer à Parker qu’elle est capable de prendre ses propres décisions, surtout quand il s’agit de proposer un service. La blonde est surprise quand la jeune femme retire son gilet pour le lui tendre ensuite. Apparemment, ses frissons ne sont pas passés inaperçus. Elle esquisse un autre sourire, plus troublé cette fois.

Tu es sûre ?

Demande la photographe, en serrant le vêtement entre ses doigts, mais sans oser l’enfiler pour autant. Elle ne voudrait pas que Parker attrape froid par sa faute. Celle-ci lui fait alors une nouvelle confidence sur son état, confidence qui la fait doucement rire.

Ah oui, à ce point-là ?... J’suis pas certaine de pouvoir te porter sur mes épaules, mais je peux te traîner par les deux bras, ou les deux pieds, au choix !

Propose la jeune femme, évidemment pour rire. Elle ne renonce pas à l’idée d’aider Parker pour autant et puis, la jolie brune n’a pas l’air ivre au point de ne plus pouvoir marcher, alors elle compte bien insister, tenant à lui venir en aide ~

Lorsque Parker lui confirme qu’elle peut prendre son gilet, Eva esquisse un sourire, et souffle un petit « merci », avant de s’en emparer, et de l’enfiler dans la foulée. Elle se sent tout de suite un peu mieux, plus à l’abri du froid en tout cas. Elle prend soin d’extirper sa chevelure blonde du vêtement, puis de se recoiffer grossièrement. Le temps semble défiler tout doucement, mais l’étudiante insiste, ne voulant pas laisser Parker derrière elle, surtout pas dans cet état. Il ne se passe jamais grand-chose à Great Falls, mais il pourrait tout de même lui arriver quelque chose et ça, la photographe ne se le pardonnerait pas. Elle suggère donc à la jeune femme de la traîner jusqu’à chez elle, pour plaisanter, bien évidemment. C’est d’ailleurs ensemble qu’elles se mettent à rire par la suite.

L’étudiante se montre cependant très attentive quand la brune reprend la parole ensuite, pour se lancer dans une explication. Au départ, Eva ne voit pas tout à fait où elle veut en venir, et fronce légèrement les sourcils. Et puis, en entendant sa dernière phrase, tout s’éclaire soudainement. La blonde se pince timidement les lèvres. Quelque part, elle est plutôt flattée, mais surtout soulagée, que Parker apprécie toujours sa présence. Avec le temps qui s’est écoulé, les choses auraient pu être bien différentes. L’étudiante esquisse un sourire un peu timide, mais son regard fixe tout de même son interlocutrice, avec une certaine assurance.

Je vois…

Murmure-t-elle doucement, en gardant ses yeux sur Parker, et en cherchant un compromis, pour que celle-ci accepte finalement d’être raccompagnée jusqu’à chez elle.

Et si je te raccompagnais, que tu m’offrais un chocolat chaud, et que je faisais un petit coucou à tes chats, est-ce que ça t’irait ?

Demande Eva, dans un sourire qui se veut tendre, avant de se lever du banc. Elle espère en effet que Parker ne refusera pas ce marché, qui lui semble très bien adapté à leur situation…

La situation aurait pu être très différente si Parker n’avait pas abusé de l’alcool au cours de la soirée. Il n’empêche qu’Eva ne préfère pas se poser la question, et ne souhaite pas imaginer non plus ce que ça aurait pu donner sans l’intervention de la vodka, ou d’une autre boisson alcoolisée. Elle se contente de vivre l’instant présent, et de savourer ces retrouvailles, qui se passent bien mieux que ce qu’elle aurait pu croire. En fait, depuis tout ce temps, les deux jeunes femmes n’avaient jamais repris contact, ce qui poussait l’étudiante à croire que Parker lui en voulait certainement. Force est de constater que ce n’est pas le cas, ce qui enlève un sacré poids des épaules de la photographe. Elle n’envisage désormais plus de quitter cet arrêt de car sans la cadette des Warner. Elle lui propose donc un marché, avant de se lever, en espérant que Parker décidera de la suivre… Fausse joie XD

Attends, je rêve, ou t’es en train de remettre mon honnêteté en question ? (a)

Demande Eva, en esquissant un sourire malicieux. C’est bien la première fois que ça lui arrive ! Habituellement, on lui donne le bon Dieu sans confession. Mais quelque part, ça la flatte qu’on puisse la voir sous un angle différent, parce qu’elle a l’impression de ne plus être tout à fait la même, avec le temps. Il n’empêche qu’elle n’a jamais songé à berner Parker, et qu’elle est effectivement prête à la raccompagner jusqu’à chez elle, et à y passer un moment si la jeune femme le veut bien.

En voyant celle-ci tendre l’une de ses mains jusqu’à elle, Eva fronce les sourcils. Elle ne comprend pas tout à fait où elle veut en venir, une fois de plus, mais se laisse docilement faire, avant de rougir légèrement en comprenant qu’il ne s’agissait que d’une histoire de cigarettes. Elle esquisse un sourire quand Parker laisse exprimer sa joie, puis essaie de reprendre le fil de leur discussion.

Si la jeune femme la croit capable de faire preuve de malhonnêteté, elle ne semble pas penser, par contre, que ses rapports avec ses parents ont pu changer. Eva hausse les épaules, avec décontraction. Elle se moque bien de ce qu’ils pourront penser, et ça, ça ne date pas d’hier.

Pas grave du tout ! Disons que les choses ont changé.

Explique brièvement Eva, avant de se pencher sur Parker en la voyant tanguer, puis s’appuyer maladroitement à la vitre de l’abribus.

Ça va, Parker ? Demande la photographe, un peu inquiète. Après s’être pris une partie de la fumée de sa cigarette en pleine figure, Eva grimace, et ajoute : C’est peut-être pas une bonne idée de fumer maintenant, tu crois pas ?

Bien sûr que non !

Répond Eva, avec tout autant de spontanéité, avant de secouer franchement la tête. Elle ne sait pas comment Parker peut s’imaginer une chose pareille, même si ça l’amuse qu’elle la perçoive différemment. La blonde ne rompt jamais ses promesses, du moins pas jusqu’à maintenant, et ne compte pas commencer ce soir pour tout dire. Ce n’est qu’une idée comme une autre pour la forcer à bouger de ce banc, et être sûre qu’elle dormira confortablement dans son lit pour la nuit. Ce sera toujours mieux que de décuver ici, et Eva tient à s’en assurer. Et puis, admettons-le, elle n’est pas contre l’idée de boire un chocolat chaud chez Parker avant de rentrer chez elle. Il faut dire que la discussion est vraiment sympathique, agréable, même… et qu’Eva n’a pas envie elle non plus de devoir lui dire au revoir trop vite. Elle se sent bien plus détendue qui plus est.

Oui, c’est vrai.

Souffle la jeune femme, dans un sourire bref. Les choses sont même radicalement différentes, désormais… ! La blonde n’est plus aussi liée à son père qu’elle l’était auparavant. Elle n’est même plus du tout liée à lui, en fait. Quant à sa mère, c’est devenue une inconnue pour elle. Et, même si au départ, l’étudiante l’a très mal vécu, aujourd’hui, elle saisit cette opportunité pour faire de sa vie ce qu’elle veut, et se comporter comme elle l’entend. Et c’est un avantage indéniable à ses yeux…

Bon, bah… continue de fumer alors (a)

Lance Eva, taquine, avant de rire. Elle ne quitte pas Parker des yeux quand celle-ci tente de faire quelques pas, il faut dire que sa démarche est tout sauf assurée. En la voyant vaciller, la photographe se précipite sur elle, prête à saisir son bras, mais tout se termine bien, puisque c’est finalement sur un poteau que la jeune femme prend appui. En tout cas, force est de constater qu’elle est dans un très très sale état… ! Heureusement, elle semble s’en rendre compte. C’est toujours ça !

C’est toujours ce qu’on dit, avant de remettre ça !

Lance la blonde, sûre d’elle. Il faut dire qu’elle sait de quoi elle parle. Elle qui voulait juste « tester » la cocaïne a fini par en prendre à plusieurs reprises… Mais là n’est pas le sujet, et autant dire qu’elle ne compte certainement pas se confier à ce propos. La photographe passe son bras sous celui de son ex, pour qu’elle puisse la soutenir, et qu’elles ne mettent pas deux heures pour rentrer XD

Appuie-toi sur moi…

Chuchote Eva, de sa voix douce, et en affichant un sourire bienveillant.

Eva n’a pas spécialement envie de parler de sa famille, ni des changements qu’elle a vus s’opérer dans sa vie concernant ses parents. Elle tente de vivre la situation aussi bien que possible, de voir les avantages plus que les inconvénients, de profiter de cette prise de distance pour vivre sa vie comme elle l’entend, et se comporter comme elle le désire. Malheureusement, ce qu’elle tente de vivre comme une « délivrance » n’est pas tous les jours simple à gérer pour elle. Longtemps, Eva a été extrêmement proche de son père. Autant dire qu’elle a senti le monde s’écrouler sous ses pieds quand il a cessé de faire preuve d'attention la concernant. Cela lui a permis d’ouvrir les yeux, mais c’est encore difficile à gérer par moment, et la photographe n’évoque ce sujet avec personne, surtout pas avec Parker. Elles ne se sont plus parlées depuis trop longtemps, et la jeune femme a été trop impliquée pour que la photographe veuille s’étendre sur le sujet avec elle. Ce serait trop compliqué. Peut-être même douloureux, en fait.

La question de Parker tombe comme un cheveu sur la soupe. La photographe fronce légèrement les sourcils, comme dérangée par cette interrogation de sa part. Avouons qu’elle ne sait pas franchement comment y répondre. C’est pourquoi elle hésite. Elle n’imagine pas afficher son bonheur sous les yeux de son ex. Pire que ça, elle ne sait pas si la relation qu’elle mène avec Devon est réellement saine. La période qu’ils traversent ensemble en ce moment est tout de même très… particulière. La blonde hausse les épaules, alors que sa gorge se noue doucement.

Oui, ça se passe bien.

Se contente de répondre Eva, toujours peu loquace, quand elle ne souhaite guère s’étendre sur un sujet en particulier. La blonde se laisse aller à rire ensuite, quand Parker tente maladroitement de lui souffler la fumée de sa cigarette au visage. Elle n’est plus vraiment en pleine possession de ses moyens. Preuve en est sa démarche, que la photographe essaie rapidement de rectifier en passant son bras sous le sien.

Toujours !

S’exclame la blonde, pour rire, quand Parker salue sa gentillesse. Cette proximité est tout de même… dérangeante. Un instant, Eva dévisage son ex petite-amie. Sa première et unique petit-amie d’ailleurs. Enfin, si on peut dire. Elles n'ont pas franchement eu l'occasion de vivre leur histoire, surtout pas au grand jour. Son cœur se serre doucement quand des souvenirs lui reviennent en mémoire. Elle préfère finalement détourner le regard, esquissant malgré tout un sourire, suite au commentaire de la brune.

Hum… merci ?

Souffle Eva dans un autre rire, ne sachant pas réellement comment prendre cette remarque. Entraînée par Parker sur la droite, la blonde tente d'inverser la tendance, en l'attirant vers la gauche du trottoir.

Si la situation était un tantinet différente, peut-être qu’Eva se serait plu à parler de Devon, mais la question ne se pose pas avec Parker. A dire vrai, la photographe ne sait pas pourquoi elle l’a interrogée à ce sujet, mais elle considère qu’il serait inapproprié d’en discuter avec elle. Qui plus est, leur relation est en train de prendre un tournant très particulier, que l’étudiante ne sait pas franchement comment définir ou gérer. Quand elle est sous influence, Eva a pourtant l’impression de tout maîtriser à la perfection… ! Mais les choses sont bien différentes quand elle prend le temps d’y réfléchir avec du recul. Ce qui s’est passé, avec Lily notamment, a tendance à beaucoup la travailler, même si la jeune femme refuse de le reconnaître ou d’en toucher deux mots à qui que ce soit. Qui plus est, sur le moment, la blonde s’était sentie réellement bien, et aussi, et surtout, parfaitement en phase avec le reste du monde, entièrement à sa place. Et ce n’est pas une sensation qui la traverse souvent pour tout dire.

Les deux jeunes femmes parviennent à être complices, malgré tout ce qu’elles ont pu traverser, et le temps qui a passé. Eva se sent donc bien plus détendue, même quand Parker lui fait une remarque sur son parfum, qu’elle ne sait même pas réellement comment interpréter. Elle sourit en entendant sa nouvelle remarque, puis est surprise par l’élan d’affection dont la jeune femme fait preuve à son égard, avant de le regretter dans la foulée…

C’est pas grave…

Murmure Eva, dans un sourire bienveillant encore, tout en prenant soin de faire marcher droit – ou à peu près – la jolie Parker. Même si sa tendresse l’a surprise, et la trouble d’ailleurs encore un peu, l’étudiante refuse de se prendre la tête à ce propos, persuadée que la jeune femme est bel et bien passée à autre chose depuis tout ce temps (après tout, elle était accompagnée ce soir !), et que ses intentions sont parfaitement innocentes.

Je mets ça sur le compte de l’alcool (a)

Souffle la photographe dans un léger rire, persuadée que tout vient de là. Et en même temps, ça l’arrange bien, en fait ! Il faut dire que, si l’alcool n’avait pas été là pour leur donner un petit coup de pouce, leur complicité n’aurait sans doute pas été si facilement retrouvée…

Eva évite de s’interroger sur la question, d’autant qu’elle sait que Parker a abusé de la boisson, et qu’elle n’est sans doute pas dans son état normal. Leur relation est terminée depuis des mois et des mois qui plus est, et les deux jeunes femmes ont eu le temps de passer à autre chose. Tout ce que souhaite la photographe désormais, c’est profiter de cette opportunité au maximum. Quelles étaient les chances pour qu’elles tombent l’une sur l’autre ce soir, et que leur complicité soit si rapidement retrouvée ? L’étudiante essaie donc de savourer le moment présent, même si elle se sent très concernée par l’état de la belle brune. Elle tente de la faire marcher à peu près droit – non sans certaines difficultés. Lorsqu’elles arrivent devant chez elle, et après avoir chanté, Parker décide soudainement de se détacher de son emprise, pour courir vers l’entrée de sa maison. La chute qu’elle fait sur l’herbe est… impressionnante. Eva a immédiatement le réflexe de pousser un cri, en portant sa main à sa bouche dans la foulée. Le fait que la propriétaire du café se mette à gémir de douleur aussitôt, et qu’elle ne tombe pas dans les pommes, est déjà rassurant en soi. Eva se précipite jusqu’à elle, en tendant les bras, sans savoir quoi réellement faire pour tout dire. En prime, Parker n’a pas l’air de se rendre compte de la chute vertigineuse qu’elle a pu faire. Elle aura sans doute de belles ecchymoses au petit matin… ! Mais pour le moment, l’alcool qui circule dans ses veines l’empêche clairement de ressentir quoi que ce soit.

Tu m’as fait peur… !

Avoue rapidement Eva, en essayant dans la foulée d’aider Parker à se relever. L’herbe, sous sa silhouette, est trempée. Les vêtements et la peau de la jeune femme le sont donc tout autant. Idéal pour attraper la crève. La photographe grimace.

Oh ma pauvre…

Murmure-t-elle, en mettant la force suffisante pour aider Parker à se remettre sur pieds. Elle jette aussitôt un coup d’œil sur son dos, ses fesses. Ses vêtements sont trempés, tâchés.

T’es dans un de ces états… ! Est-ce que ça va ? Comment tu te sens ? T’as mal quelque part ?

Demande Eva, inquiète, en tenant les mains de son ex, et en la détaillant sous toutes les coutures.