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Quatre murs d'un jaune très pâle, trois armoires, six tiroirs, un lit en chêne et une petite table décorée d'un napperon rouge et de bougies blanches. Son abri depuis deux mois. Soixante jours. Entre quatre murs. Tous les soirs. Liv devenait folle! Son nouveau chez-soit lui avait beaucoup plus de prime abord mais ne pas avoir un véritable endroit où vivre insupportait. Du moins, voilà l'état dans lequel elle se trouvait lors de sa première visite au vidéo club. Mais aujourd'hui était un grand jour, elle venait d’emménager dans sa maison. Quatorze pièces, une tonne de fenêtres et un jardin. Rien que pour elle. La collocation était parfaitement envisageable mais il lui resterait une demi villa pour vivre!

Vêtue décontractée et sautillant presque dans la rue, Liv se sentait à l'aise ici. Petit à petit, des habitudes lui revenaient, cette endroit n'était plus inconnu et elle commençait à y voir se dessiner des projets et un véritable avenir. Elle ne se préoccupait donc plus beaucoup de son apparence, du moins en soirée, quand elle allait juste remettre un DVD. En repensant à sa rencontre avec Craig, deux semaines au paravent, un large sourire dessina ses lèvres, elle avait adoré le bousculer mais il était très sympathique, elle espérait intimement pouvoir rediscuter une nouvelle fois avec lui. Mais pas ce soir, elle était pressée de faire ses valises pour déménager tot le lendemain.

Le vendeur était parfaitement semblable à la fois précédente, peut-être avait-il recoupé ses cheveux...Bref, qu'importe, elle lui remit "The King' sheep" et s'avança vers la sortie. Soudain, elle retint un cri en plaquant sa main sur sa bouche et se colla, d'un bond, derrière une rangée de films.
Il était là. Par il il fallait comprendre lui. Oui, exactement. Impossible, que ferait-il au milieu de nul part à des kilomètres de sa ville dans un vidéo club perdu dans la campagne? L'idée fusa à peine une seconde qu'il la cherchait mais bien sur que non, il était bien trop égoïste. Après quelque minutes, ayant calmé son poul elle se pencha en avant et s’aperçut que ce n'était pas vraiment Aaron. Même type de tenue, de carrure, d'air et de coupe de cheveux mais la guitare brisait le rêve. Ou plutôt le redorait, c'était si sexy une guitare. Enfin, un mec qui joue de la guitare quoi.

Assise, derrière un rayon, elle l'observait furtivement de temps à autre.

Exactement la même coupe de cheveux, c'en est perturbant! Au fond, une coiffure de mec, ce n'est qu'une coiffure de mec mais là, de la teinte à la mèche près...Alors que Liv jetait un troisième regard soit disant discret, il la vit et croisa son regard. Elle lui rendit très vaguement un sourire et se détourna en s'enfuyant presque. Lorsqu'elle fut hors de sa vue, elle sortit son GSM pour y trouver une photographie d'Aaron, elle les avait gardées, évidemment, cela faisait mal mais c'était bien pire de réaliser, au milieu de la nuit, qu'elle avait oublié la teinte exacte de ses yeux. Elle était accroc à contre coeur. Elle ne se trompait pas, il ressemblait fort à l'inconnu qui ne lui avait jeté qu'un banal regard. Preuve que ce n'était pas lui, elle pouvait lui reprocher un millions de choses, il n'était pas du genre à la snober.

Après une longue réflexion, Liv se dit que ses bagages attendraient. Elle se décida à lui adresser la parole. Inspirée par les pochettes de films, elle avait d'abord imaginé le bousculer par mégarde mais son manque de naturel serait flagrant. Liv se recoiffa vivement et alla à sa rencontre, se focalisant sur sa respiration qu'elle voulait calmer et son regard qui ne devait pas se focaliser sur l'intensité de son regard. Ce n'était pas lui.

-Euh...salut! Je voulais savoir si tu, pardon, vous, pouviez me conseiller.

Un sourire timide qu'on ne lui connaissait pas, sur les lèvres, elle patienta tout en priant pour qu'il ait une voix à la hauteur.

Le dévisageant, l'analysant, tentant de déceler tout ce qui en faisait lui, tout ce qui en faisait un autre. Liv aurait eu envie de lui sauter au cou et de s'éffondrer en excuses. Lui dire à quel point elle pouvait l'aimer, à quel point il lui manquait. Aaron était son univers, pas cet inconnu. Comment pouvait-il lui faire un tel effet? Mais pire encore, comment son ex fiancé pouvait-il encore la tortuer après deux mois et un million de promesses tues pour l'oublier. Indépendante et forte? Elle l'était moins qu'un enfant à la charge de sa mère. Il lui avait du mal, elle avait fait un choix qu'elle assumait parfaitement, celui de ne plus jamais le voir, et pourtant, elle tombait raide face à quiconque le lui rapellait. Elle trouvait navrant de s'imaginer suppliante face à lui s'ils se croisaient, et elle savait malgré tout que ce serait sa réaction.

Sa voix différait, elle en fut ravie mais cela ne la défit malheureusement pas de son besoin de le retrouver. Damné soit-il! Et elle avec...

-Oh, je...fit-elle lorsqu'il ne parut pas apte à la conseiller. Mais puisqu'il compléta, la jeune femme observa la pochette avec un intérêt inutil et fein. Elle lui cachait ses yeux qui s'enbuaient. Aaron haissait les films de ce genre. Titanic, combien de fois lui avait-elle demandé qu'ils le regardent ensemble, il s'était défilé à chaque fois.

[Pourquoi n'es-tu pas vraiment lui?]

-Je ne connais pas...pourquoi pas. C'est quel genre?

Reprendre contenance.

Comment pouvait-on se faire tellement mal comprendre? A vrai dire, si c'était la première fois, elle se serait dit que puisqu'elle le considérait comme Aaron, elle avait peut-être prit un ton qu'ils n'utilisaient qu'entre eux et que donc son interlocuteur n'avait pas put comprendre mais cela faisait trois fois depuis son arrivée! Alors qu'il lui semblait dire quelque chose de tout a fait normal, son interlocuteur prenait une mine surprise avant de répondre la voix pleine de doutes.

-Je parlais de l'autre...The Reader.

La jeune femme parvint a sourire malgré sa perplexité : les newyorkais avaient-ils vraiment un accent étrange? Et puis, comment pouvait-on croire qu'elle ne connaissait pas Titanic? D'accord, son ex ne voulait pas en entendre parler mais elle était persuadée qu'il l'avait déjà vu. Et puis, de son coté elle avait vu presque tous les films avec Leonardo Di Caprio. Loin d'elle l'idée de faire une fixation sur le bel acteur mais, puisqu'elle aimait le cinéma, elle aimait les bons acteurs. Johnny Depp et David Tenant en étaient deux autres.

-Vous semblez vous y connaitre malgré tout...

Un sourire presque fasciné vint compléter son expression.

[Arrête de le draguer!]

Inconsiemment, la jeune femme adoptait un ton de voix étrangement doux et une posture presque étrange lorsqu'elle lui parlait. Lui, un inconnu!

Voir le sosi de son dieu vivant fondre de honte, rougir, brefouiller quelques mots dévastait Liv. Elle regrettait amèrement de l'avoir mit dans une telle situation et finit elle même par se sentir mal à l'aise. Elle chuchota un "Ce n'est rien" à peine audible et qu'il ne du même pas remarquer vu son état préocupé. Liv aurait tellement aimé l'étreindre et le rassurer,...L'inverse aurait été plus habituel mais elle était prête à toutes les actions ridicules pour qu'il se sente bien.

Au final, il fallut près de trois minutes au jeune homme pour qu'il retrouve un état normal et Liv ne put que se sentir en meilleur état en le voyant lui même revigoré. Tout cela pour un mal entendu!

-Oui, bien sur...Un lien quelconque avec la littérature? Le titre semble y être lié! Je fais des études d'histoire de l'art et je suis donc amenée à étudier des documents...

Elle se vendait comme un marchand vente ses fraises et ses choux dans son étale au bord de la plage. La jeune femme réalisait être complètement ridicule et ne parvenait même pas à se métriser. Il lui semblait qu'une épée de Damoclès était suspendue au dessus de sa tête et qu'elle s'abatrait sur sa vie si elle ne parvenait pas à plaire à cet inconnu. Il l'inspirait, l'envoutait, il lui rappellait ce qu'elle avait aimé dans son passé mais il n'en était pas moins un inconnu qu'elle venait de croiser.

-Pourquoi aimez vous tant ces films? Si ce n'est pas indiscret...

-Der Vorleser , prix des libraires du Québe publié en 95 qui est partiellement autobiographique. Bernhard Schlink, nait en 44 il écrit énormément de romans policiers, chose assez compréhensible vu les études de droits qu'il a fait...

Un léger sourire flotte sur ses lèvres lorsqu'elle clot son court monologue.

-Cela me parle directement plus!

Elle ne tentait pas le moins du monde de frimer, en même temps, de moins en moins de personnes pouvaient être impréssionnées par des connaissances en matière de littérature, mais puisqu'il semblait trouver ses études intéréssantes, elle lui prouvait que ce n'était pas un énième stratagème de drague. En même temps, elle n'était pas certaine qu'il ait réalisé qu'elle lui faisait les yeux doux depuis leur rencontre. Un homme aussi aveugle aux efforts d'une jeune femme était automatiquement attiré par quelqu'un d'autre...le regard qu'il portait à Kate Winslet tout en passant pensivement ses doigts sur sa représentation en disait bien assez!

-Oh, peut-être l'ais je déjà rencontre s'il suit des cours à l'université...Un étudiant?

Liv ne pensait à personne en particulier, après deux semaies de cours elle ne connaissait guère de monde, mais elle imaginait déjà sa vie scolaire réduite à néant par la rumeur de son échec total en matière de séduction s'il venait raconter cette entre vue à ce fameux meilleur ami.

-Je confirme qu'elle joue particulièrement bien!

Liv aimait fort les jeux d'acteurs de Kate Winslet, peut-être pas au point d'être citée comme fan mais, au fond, elle n'était pas vraiment fan d'un acteur. Certains noms lui venaient à l'esprit, ceux qui l'avaient marquées et qu'elle trouvait excellent mais elle n'était pas du genre à chercher à tout prix un autographe ou une édition collector de leurs derniers films. En musique, il est vrai qu'elle s'attachait un peu plus au groupe en lui même mais guère exagérément non plus.

Un journaliste qui passe sa vie au théâtre ou dans des musées, qui est un fan incontestable de littérature et qui est un habitué de la librairie principale - si pas unique, Liv n'en savait rien - de Great Falls,...et elle n'avait d'yeux que pour lui. Pas qu'il n'ait rien de séduisant mis à part la ressemblance avec Aaron, il avait un petit style différent fort plaisant et avait une conversation très agréable mais, par vraisemblance, elle aurait dû s'intéresser à ce fameux meilleur ami, l'interroger discrètement sur son identité. Et rien n'y faisait, il était le seul dans son esprit, à cet instant précis.

La façon qu'il eut de réagir, presque gêné, en se mordant la lèvre fit fondre ce qui pouvait rester "d'inenvouté" en elle. Par contre, Liv se sentit mal à l'aise de le voir ainsi sans même en comprendre la raison. Il lui faisait perdre tous ses moyens, dont le fil de la conversation. Elle le fixait avec la même expression perdue qu'il avait adopté lorsqu’elle avait monologué à propose de Der Vorleser, que devait-elle dire?

Un court silence s'installa, elle avait bien compris sa dernière question mais n'avait aucune envie de paraitre idiote ou désintéressée en ne réagissant pas face à ses autres dires. Il aurait été tellement plus simple qu'elle reste enfermée chez elle à tenter de bouquiner, à réfléchir à une tenue pour le lendemain, à étudier un livre de cours, bref, tout sauf venir ici. Il y aurait bien eut un jour ou ils auraient dû se rencontrer, pour cause, ils vivaient la même ville mais pas si près de sa fuite. Il la hantait et un fantôme de plus à embrouiller ses pensées ne l'aiderait certainement pas. Elle se retrouvait confrontée à deux inconnus - Aaron, en était bien un aujourd'hui- qu'elle aimait sans comprendre, qu'elle voulait fuir et qui n'avaient de cesse de la perturber, de s'incruster dans sa vie sans même le savoir. Ils ne pouvaient être fautifs à ses yeux mais ils étaient malgré tout à la base de ses difficultés.

-Je ne sais pas bien...Il m'intéresse mais j'ai peur de pleurer seule!

Son ton n'avait rien de faussement sensuel et elle n'en remerciera jamais assez sa voix mais elle voyait bien dans sa réponse une invitation qui aurait sonné bien mieux si elle avait été claire. En même temps, elle clos bien un sujet auquel elle n'avait pas suivis la moitié...

-Plus sérieusement, si vous avez le temps et l'envie aussi, on pourrait le visionner un jour...

Elle aurait voulu revenir sur son ami journaliste, plus pour changer de sujet que par réel intérêt car un nom qui lui était très certainement inconnu, ne l'aiderait pas beaucoup mais elle n'y put rien, elle appréhendait une réaction braquée. En même temps, un rejet était tout à fait normal, personne n'invitait un parfait inconnu à regarder un film mais elle se sentait tellement proche de lui, enfin, de l'autre...