Aujourd'hui, Stan a enfin quelques jours de repos, après être resté près d'une semaine à Chicago pour son travail. Ce voyage lui avait tout de même permis de changer d'air, bien que ce n'était pas vraiment des vacances. Parce que pour lui, passer ses journées à défiler sur des podiums, ça ne ressemble en rien à des vacances... Enfin, maintenant qu'il est de retour à Great Falls et qu'il a une journée de libre, il compte bien en profiter.

Puisque le beau temps semble bien décidé à rester à Great Falls encore un moment, le mannequin en profite pour s'aérer les poumons au maximum. C'est pour cette raison qu'il sort cet après-midi se balader un peu, simplement vêtu d'un short et un marcel* avec des tong aux pieds. Il fait trop chaud pour sortir autrement de toute manière.

Il marche tranquillement, son baladeur mp3 dans les oreilles qui lui joue un album des Black Keys, un groupe qui a tendance a le mettre de bonne humeur. Le grand brun finit par se retrouver au bord du lac Michigan. A croire que ses jambes ont tellement l'habitude de s'y rendre qu'elles y vont maintenant automatiquement..!

Stan décide alors de faire une pause, et s'éloigne donc un peu du sentier bordant le lac, où il y a trop de personnes à son goût, pour s'asseoir un peu plus loin, au pied d'un arbre immense qui lui fournit l'ombre idéal pour ne pas subir cette chaleur écrasante. Il pose alors son sac à coté de lui, et y range son baladeur pour le troquer contre un roman qu'il avait apporté au cas où. Le deuxième tome de The Farseer Trilogy, dans lequel il se plonge sans plus tarder.

Erika adorait les longues promenades en solitaire, dans la campagne avoisinante. Great Falls était certes un petit coin de paradis, l’adolescente appréciait malgré tout de s’exiler, parfois. Elle n’emmenait qu’un livre, parfois même deux, puis elle s’asseyait à l’ombre d’un arbre pour le dévorer en un rien de temps.

C’était une journée particulièrement chaude qui s’offrait aux habitants de la petite ville, et la plupart préféraient soit rester chez eux, soit profiter des derniers jours de vacances pour s’amuser au bord de l’eau. ; Elle regretta de ne pas avoir pris au moins une bouteille d’eau mais renonça à rebrousser chemin. Si elle revenait chez elle, elle n’aurait probablement pas le courage de faire le même trajet sous cette chaleur accablante. Elle s’éloigna donc des dernières maisons de Great Falls, s’engagea sur un sentier caillouteux qui serpentait à travers la campagne, et rejoignit plus tard le lac Michigan. Hélas, il y avait encore trop de monde pour Erika, qui préférait aisément se détendre en solitaire. Après un instant d’hésitation, elle s’éloigna jusqu’à parvenir à l’ombre de quelques arbres qui lui apportèrent une certaine fraîcheur.

Un sourire éclaira son visage pâle. Rien n’aurait pu lui faire davantage plaisir. Ici, elle ne subirait pas les problèmes quotidiens. On ne lui parlerait ni de lycée, ni de garçons, ni de sujets futiles dénués de tout intérêt. Ici, elle pourrait enfin redevenir elle-même. Elle fouilla dans son sac en bandoulière, en retira un vieux livre maintes fois lu, maintes fois ouvert. La couverture tenait encore, bizarrement, et empêchait visiblement les pages de partir en poussière. Erika déchiffra les lettres inscrites, « To kill a Mockingbird », et elle se remémora la première fois où elle l’avait découvert, sous une pile de vieux ouvrages à la librairie. Désormais, cette histoire la suivait partout. Elle adorait ce livre.

Pressée d’en continuer la lecture, elle n’attendit pas de s’être assise pour l’ouvrir et préféra le faire en marchant. Son regard se posa sur les minuscules caractères imprimés tandis qu’elle avançait à pas lents, sans se soucier des environs. En levant rapidement la tête, elle avisa un gigantesque arbre qui pourrait faire l’affaire. Tout en baissant de nouveau les yeux sur son livre, elle contourna un ensemble de larges buissons pour rejoindre le tronc de l’arbre, et…

« Nom de Dieu !! »

Erika exécuta un bond en arrière et son cœur rata un battement. Là, à l’abri des regards indiscrets, adossé contre l’arbre et caché par les buissons, se tenait un jeune homme un peu plus âgé qu’elle, également plongé dans un livre. Elle venait littéralement de lui marcher dessus !
Elle poussa une exclamation de stupeur, puis avisa la tenue de l’inconnu, simplement vêtu d’un short et d’un marcel. Tenue estivale largement recommandée pour une telle journée, mais surprise, Erika ne put s’empêcher de devenir rouge pivoine. Ses joues rosirent tandis qu’elle bégayait :

« Je… Je… Je suis désolée, je… »

Elle se figea, l’air paniqué, incapable de parvenir à aligner trois mots. De surprise, elle en avait fait tomber son livre sur le sol. Elle ne parvenait même pas à lui adresser un sourire d’excuse. Le ridicule ne tuait certes pas, mais elle aurait largement préféré se retrouver six pieds sous terre…

Stan a un caractère facile et ose rarement imposer ses idées ; il lui arrive régulièrement de se laisser marcher sur les pieds, mais jamais au sens propre du terme ! Une première aujourd’hui puisque, alors qu’il est assis à l’ombre d’un arbre et tranquillement plongé dans son roman, il sort brusquement de sa bulle en sentant quelqu’un lui taper dedans, lui marcher dessus même..!

Il lève rapidement les yeux alors que la jeune fille jure. Le mannequin ne la connait pas, mais comprend bien vite que cette ‘collision’ est un accident. Elle semble réellement gênée, et a fait tomber un livre par terre. Un livre qu’elle était sans doute en train de lire en marchant. C’est dangereux de faire ça, la preuve !

Le grand brun ferme alors son livre, le temps d’attraper celui de la demoiselle, tombé à coté de lui. Machinalement, il en lit le titre. To kill a mockingbird. Un discret sourire éclaire son visage. Il a lu ce livre il y a déjà quelque temps, et l’a beaucoup aimé, même si ce n’est pas son genre de prédilection lui qui est accro au fantastique et à la science fiction.

C’est rien t’en fais pas. La rassure-t-il quand elle s’excuse, un sourire amical aux lèvres.

Tiens. Ajoute le jeune homme en lui tendant son ouvrage.

L’inconnu ne semblait pas bien méchant et, surtout, pas gêné le moins du monde alors qu’elle lui avait littéralement marché dessus. Erika aperçoit ses yeux se poser sur la couverture de son livre, qu’elle venait de faire tomber, et le mince sourire qui en découla. Peut-être l’avait-il déjà lu, ou bien peut-être se moquait-il tout simplement de ses lectures. Qu’en savait-elle, dans le fond ? Elle ne lisait pas dans les pensées.

Il lui tendit le vieux livre avec un nouveau sourire sincère, et elle le reprit en bégayant un simple « merci ». Et voilà, encore une première rencontre avec la gente masculine qui se passe mal. Erika s’invectiva mentalement et se maudit, elle et toute sa descendance. Quelle stupidité, sérieusement… Maintenant, elle va passer pour une adolescente idiote et incapable d’aligner deux mots l’un à la suite de l’autre. Surtout devant un jeune homme qui possédait suffisamment de charme pour le faire rougir. Et puis, avec son visage et sa singulière carrure, il aurait pu tout droit être sorti d’un magazine de mode.

Un blanc s’installa entre les deux jeunes gens, et Erika n’osa pas croiser son regard. Au contraire, ses yeux se perdirent dans le paysage tandis qu’elle réfléchissait à ce qu’elle pourrait bien dire pour meubler cette étonnante conversation. Enfin, conversation n’était pas le mot. Echange banal de quelques mots, plutôt.

« Je m’appelle Erika Carter. Vous… Enfin, tu connais peut-être ma famille », annonça-t-elle finalement, après avoir pris sur elle pour s’exprimer d’une voix assurée et franche.

Elle s’était enfin remise de la bousculade et, après avoir remis ses idées en place, se sentait prête à entamer un semblant de discussion.

« Alors… Qu’est-ce que tu lis ? »

Autant partir sur un sujet sur lequel elle possédait de bonnes bases. Amatrice de lecture, Erika pouvait discuter des heures de ce passionnant sujet et, au moins, elle ne risquait pas de s’emmêler les pinceaux là-dessus.

Stan est lui même quelqu'un de plutôt maladroit, alors pour une fois que ce n'est pas lui qui fait une gaffe, il ne peut que pardonner à la personne en question..! Surtout que ce n'est pas grand chose, cette jeune fille ne l'avait simplement pas vu, et en semble sincèrement désolée.

Elle récupère son livre, sans pour autant s'en aller. Stan ignore alors ce qu'il est censé faire, si elle a envie de discuter ou si elle est pressée... Alors il reste silencieux, comme il sait si bien le faire x). La blonde finit par reprendre la parole, pour se présenter.

Hm... Non ça ne me dit rien. Enchanté en tout cas, moi c'est Stan, Stan Kellerman.

Répond-il dans un sourire chaleureux. Il a déjà entendu le nom de 'Carter' quelque part mais n'en sait pas plus. Cela ne l'empêche pas de se montrer amical avec elle évidemment. Erika semble finalement vouloir discuter un peu, et même si le mannequin est quelqu'un de solitaire cela ne le gêne pas de parler un peu avec elle au contraire. Stan regarde machinalement son livre avant de relever la tête vers la demoiselle pour répondre à sa question.

"The Farseer Trilogy", tu connais ? Demande-t-il, toujours un léger sourire aux lèvres.

Etrange, songea mentalement Erika. Elle aurait cru qu’à l’évocation de son nom de famille, l’inconnu réagirait. Great Falls étant une toute petite ville, tous les habitants se connaissaient plus ou moins. Surtout, la famille Carter était connue pour être la plus nombreuse du coin.
L’adolescente retrouva un peu de sa sérénité, comprenant qu’il ne la mangerait probablement pas et même, il paraissait presque sympathique à ses yeux.

Elle se plongea quelques instants dans ses réflexions, mais elle non plus, n’avait jamais entendu ce nom, et encore moins vu ce singulier visage. Kellermann… Non, ça ne lui disait absolument rien. Elle lui rendit son sourire, trop heureuse de pouvoir enfin faire face à un être humain de l’autre sexe sans perdre totalement ses moyens, et se transformer en une framboise géante.
Très vite, le dénommé Stan répondit à sa question. De même, elle ne connaissait ce livre que de nom, et de couverture, jadis entraperçue dans un rayon de fantasy d’une quelconque librairie.

« Ça me dit quelque chose, mais je n’ai jamais lu. C’est bizarre, d’ailleurs, j’ai tendance à lire tout ce qui me tombe sous la main… »

Elle était plutôt friande de romans policiers, à suspense, ou de livres réalistes portant sur les problèmes de la société. Mais elle appréciait de temps à autre lire quelque chose de plus léger, qui lui permettait de s’évader, de voyager. Le seul bouquin du genre qu’elle avait lu, c’était Le seigneur des anneaux. Et encore, malgré son amour pour les lettres et toute sa bonne volonté, elle avait survolé les cent premières pages, et lu la fin avant le début.

Son regard, qu’elle évitait soigneusement de porter sur le jeune homme – une vieille habitude dû à sa timidité - se posa de nouveau sur la couverture, tandis qu’elle hésitait, se demandant s’il était judicieux de poser une question un peu plus personnel. Enfin, pas trop non plus…

« Tu es nouveau dans le coin ? Je ne t’ai jamais vu à Great Falls. Enfin… »

Elle doutait sérieusement qu’il vienne de débarquer. On ne s’installe pas à Great Falls parce qu’on y a vu de la lumière, il faut avoir une bonne raison, et sans doute connaître le coin avant. Bien qu’elle ait littéralement grandi ici, Erika était loin d’être l’adolescente la plus sociable et, de ce fait, ne connaissait pas tous les habitants de la ville. Mais n’empêche, elle se demandait pourquoi elle ne l’avait jamais vu, ou du moins jamais entendu parler. Ou alors, peut-être qu’elle l’avait déjà croisé dans les rues de la ville. C’était possible après tout. Erika n’était franchement pas du genre à retenir les visages et, bien qu’observatrice, elle n’associait jamais les noms aux visages.
Toutefois, elle se surprit à se dire que sa remarque était peut-être ridicule. S'il vivait là depuis toujours et connaissait les lieux comme sa poche, elle se sentirait bien gênée !

Même si Stan vit à Great falls depuis plusieurs années maintenant, on ne peut pas dire qu'il y connaisse beaucoup de monde finalement. Bien sûr, la taille de la ville fait qu'il connait au moins de vue les habitants de sa rue, et quelques autres, mais il n'est pas du genre à taper la discut' au premier venu, ni à suivre les potins du coin, alors il connait sans doute moins de monde que la plupart des gens ici... C'est certainement pour cette raison qu'il ne connait pas les Carter d'ailleurs, pas avant de rencontrer cette jeune fille en tout cas.

Une fois la gêne de cette rencontre passée, ils commencent à discuter, un sujet qui plait à Stan et qui le met à l'aise puisqu'il adore les livres, tout comme elle visiblement.

Ah oui toi aussi ? Constate-t-il en souriant lorsqu'elle avoue lire tout ce qui lui tombe sous la main. Franchement c'est une série géniale, tu devrais la lire quand t'as le temps !

Fait remarquer le mannequin en toute franchise. C'est vrai que lui n'est pas très difficile niveau lecture, mais il a tout de même des livres "coup de coeur", et celui ci en fait partie ! En plus il a de quoi faire vu le nombre de tomes et la taille de chacun.

Nan pas vraiment, ça doit faire.... cinq ans et quelques que je vis ici maintenant. Avoue-t-il après une courte réflexion. Mais je sors pas tellement aux soirées et tout ça, donc c'est sans doute pas si surprenant qu'on se soit jamais croisés... Suppose ensuite le grand brun.

Tu vis ici depuis longtemps toi pas vrai ?

Puisqu'elle lui a parlé de sa famille un peu plus tôt, ça veut dire qu'elle doit être d'ici non ? En tout cas cela ne l'a pas empêché de ne jamais la croiser encore... Mieux vaut tard que jamais !

Erika se détendit considérablement une fois qu’elle se rendit compte que l’inconnu – qui n’était plus si inconnu que cela désormais – n’était pas méchant et surtout, qu’il partageait le même goût pour la lecture. Il était en effet difficile pour elle de rencontrer des jeunes de son âge qui puissent converser sur des sujets tels que les soirées de beuverie, les garçons, le dernier sac à main qui venait de sortir à Milwaukee. Des sujets futiles aux yeux de la blonde et qui ne l’intéressaient qu’à peine. Sauf de temps en temps, selon son humeur.

Elle mémorisa mentalement le nom du bouquin en question pour pouvoir farfouiller dans la librairie une fois le moment venu. Elle approuva d’un hochement de la tête pour lui signifier qu’elle lirait probablement le livre dès qu’elle disposerait d’un moment de libre. Pour la lecture, toujours. Rien de mieux que de se caler contre un oreiller pour dévorer une histoire prenante qui la forcerait à cumuler les nuits blanches.

Erika réfléchit quelques instants, et se sentit soudain très bête. Donc, Stan n’était pas nouveau dans le coin. Evidemment, elle aurait dû s’en douter. Peu étaient les nouveaux arrivants à Great Falls, la ville étant si petite qu’on passait toujours à côté sans s’arrêter. Dommage, songea l’adolescente, car ce coin de paradis regorgeait de merveilleux et fascinants coins qui plairaient à n’importe qui. L’esquisse d’un sourire éclaira son visage angélique tandis qu’elle répondait :

« Ouais, faut dire que moi non plus. Je ne sors pas tellement de chez moi… »

Elle se tut, comme consciente d’avoir prononcé une absurdité, et se dépêcha d’ajouter avec un empressement suspect :

« Enfin, je veux dire… Je sors quand même. Je ne suis pas non plus asociale. Disons que… ce n’est pas trop mon truc… »

La jeune fille s’injuria mentalement. Erika Carter, tu es la fille la plus cinglée que le monde ait créé jusqu’alors. Et tais-toi avant d’aggraver ton cas. Son malaise devant la gente masculine la perdra définitivement. Mais pourquoi ne parvenait-elle pas à se comporter normalement ? Comme toute jeune fille qui se pâmerait devant un beau jeune homme ? Haha. Cette idée la fit sourire. Elle n’était certainement pas ainsi. Et ne changerait probablement jamais.
Elle se remémora son enfance, se souvint de tous ces moments passés, tous ces endroits qu’elle avait découvert avec ses amis, tous les jeux qu’elle avait pu inventer.

« Oui, j’ai littéralement grandi ici. Je n’ai toujours connu que Great Falls, alors… Je ne me vois pas trop partir. Et toi ? Tu habitais où avant de venir t’enterrer dans le coin ? »

Elle était réellement intriguée par le jeune homme, parce que bon, le seul fait qu’il puisse adorer les livres – et qu’il ne sorte guère – la fascinait. Elle avait hâte d’en apprendre plus à son sujet.

Peut être que Stan a suffisamment de charisme pour que, de loin, des personnes ne le connaissant pas le trouvent 'imposant', mais une fois qu'il a ouvert la bouche, sa timide se fait sentir bien vite et c'est facile de deviner qu'il ne ferait pas de mal à une mouche... Il n'y a pas un brin de méchanceté en lui, et Erika a dû rapidement s'en rendre compte. Elle ne craint rien à rester dans un endroit isolé avec lui. D’ailleurs, il le lui montre bien vite puisqu'il commence à discuter gentiment, des livres. Un centre d’intérêt qu'ils ont en commun visiblement.

Cela pourrait paraitre étonnant qu'ils ne se soient jamais croisés avant, mais pour Stan cela s'explique facilement. Il est discret, sort peu, et est donc loin de connaitre tous les jeunes de la ville même si cela fait maintenant plusieurs années qu'il y vit. Un sourire se dessine sur ses lèvres quand Erika semble vouloir se justifier de ne pas beaucoup sortir non plus. Comme si le mannequin allait penser qu'elle était une sorte d'ermite qui reste cloitrée chez elle si elle n'ajoutait rien... Bien sûr, c'est loin d'être le cas. Et quand bien même elle aurait une vie de reclus, Stan n'y verrait rien de mal tant que c'est une vie qui lui convient.

Je comprend.

L'aide un peu le mannequin, pour éviter qu'elle se noie sous des explications inutiles alors qu'il a bien compris l'idée. Ils doivent être un peu pareil sur ce point, en fait.

Tant mieux alors, si tu te sens bien ici.

Conclu le mannequin en apprenant que la jeune fille à grandi à Great Falls et s'y plait toujours. Il répond ensuite à sa question.

J'ai grandi Minneapolis. Autant dire que c'est pas vraiment la même ambiance qu'ici.

Ajoute le grand brun dans un sourire. Sa ville natale est immense comparée à Great Falls, c'est vraiment autre chose. Mais à choisir, Stan se sent mieux dans la petite ville. Peut être aussi que ce sentiment est lié au fait qu'il a pas mal de mauvais souvenirs à Minneapolis finalement...

Tu peux t'asseoir tu sais.

Fait-il remarquer dans un nouveau sourire amical, puisque la demoiselle est toujours débout devant lui. Il se sent petit pour une fois x).

[HJ : Sorry pour le retard, ça ne se reproduira plus ^_^]

Erika ne trouva rien d’autre à faire que de lui sourire de façon assez gênée, comme toujours quand elle peinait à formuler une réponse intéressante. Elle ne connaissait rien de Stan, mais il dégageait une singulière aura de confiance et elle avait l’étrange sensation que tous deux, au-delà de se ressembler, se comprenaient. Sensation peut-être totalement fausse et injustifiée, mais bon, elle n’avait rien d’autre à faire à part de discuter – et de lire pour une énième fois son bouquin tout déchiqueté, certes – et n’était pas contre l’idée de faire connaissance avec une nouvelle personne. Bien que sociable et observatrice, elle n’était pas forcément très à l’aise pour débuter une conversation, et elle ignorait si Stan était dans le même cas qu’elle. De plus, elle ne savait pas ce que donnerait la rencontre entre deux timides préférant la compagnie des livres à celle des autres humains !

Il était vrai que cela faisait déjà un certain temps que la jeune fille poireautait debout, plantée devant le jeune homme assis, ce qui n’était pas forcément la meilleure solution pour discuter tranquillement, surtout que Stan, s’il voulait la regarder dans les yeux, était obligé de lever la tête vers elle, quitte à se choper un torticolis monstre. Elle accepta donc après un léger rire son invitation et s’installa tranquillement en face de lui, dans l’herbe abondante qui allait probablement salir ses vêtements – comme toujours.

« Minneapolis ? Wow », fit-elle avec une légère pointe d’admiration. « C’est clair que ça doit franchement te changer ! Je ne connais pas, en tout cas. »

Elle ne voulait pas paraître trop indiscrète dès à présent et préféra ne pas se risquer à lui demander ce qui l’avait conduit à quitter une aussi grande ville pour planter ses racines à Great Falls. A bien y réfléchir, Erika préférait largement la campagne et l’air qui s’y rapportait, mais elle aurait adoré vivre, ne serait-ce que quelques mois, en ville. Le shopping, les nombreux cafés, l’anonymat obligé…

Il n’empêche que Stan l’intriguait toujours autant et qu’elle était déterminée, comme d’habitude, à en apprendre plus à son sujet.

« Et sinon, tu fais quoi ici ? T’es étudiant ? »

Elle essaya de se l’imaginer en étudiant, et se demandait en quoi. Quelque chose en rapport avec les livres, peut-être. En fac de lettres ? Il avait la tête d’un littéraire en tout cas, selon elle. x)

« Je suis encore au lycée, pour ma part », expliqua-t-elle avec une légère grimace, pressée d’en partir enfin. « En terminale. J’ai l’impression que ça ne finira jamais ! »

Stan n'est pas très bon en ce qui concerne les relations humaines, alors ce n'est pas lui qui va se permettre de juger Erika à ce sujet. Elle sera toujours plus douée que lui pour faire la conversation de toute façon..! Ils commencent d'ailleurs à discuter, un sujet qui met à l'aise le mannequin puisqu'il s'agit d'un de ses passe-temps favori : la lecture.

Puisque la jeune fille ne semble pas particulièrement pressée, mais plutôt d'humeur à discuter, le grand brun lui propose de s'asseoir. Lui qui n'est pas très bavard habituellement, il a aujourd'hui envie de parler un peu lui aussi. Peut être parce qu'il trouve que la jeune fille en vaut la peine.

C'est... grand. Explique le mannequin, ne trouvant pas de mot plus transcendant pour décrire sa ville natale. Peut être est-elle belle pour les touristes de passage, mais lui a connu ça depuis sa naissance, alors il n'y voyait pas de beauté particulière. Pour tout dire, je me sens mieux à Great Falls.

Avoue-t-il ensuite en toute sincérité. Il se sent bien ici à vrai dire, l'air calme et paisible du village lui convient mieux que les imposants boulevards de Minneapolis, avec cette foule permanente dans les rues...

Nan, ça fait un petit moment que j'ai abandonné les cours maintenant... Je suis mannequin.

Répond ensuite le grand brun face à la curiosité de la blonde. Il n'était pas forcément fier de la tournure de sa vie professionelle, il aurait aimé être assez brillant pour continuer les cours et au moins obtenir son bac, mais il assume ce qu'il fait. Il apprend alors que la demoiselle est en terminale.

ça va passer plus vite que tu ne le penses je suis sûr. Fait-il remarquer dans un sourire. Tu veux faire quoi après le lycée ?

La seule vision d’une gigantesque ville que pouvait avoir Erika était celle avec de hauts buildings, des gens pressés qui couraient tels des dératés en hélant un taxi, ou encore de l’air irrespirable qui contrastait avec celui d’ici. Une vision qui ne lui faisait plus si envie que cela, finalement. Elle l’écouta parler avec attention, tant il l’intriguait, et ne put s’empêcher de sursauter quand il lui indiqua ce qu’il faisait désormais. Mannequin ?! Elle s’attendait à tout, sauf à ça. Un mannequin perdu à Great Falls ? Quelle étrange idée. Mais il avait le physique, en tout cas. Et la carrure adéquate également.

« Mannequin ? » s’enquit-elle avec une pointe d’excitation. « J’aurais dû m’en douter… C’est la première fois de ma vie que je rencontre un mannequin. Tu dois avoir une vie de dingue, non ? »

Elle s’était toujours fait des films à ce sujet ; même si ce n’était pas trop son truc, les défilés et le reste, elle s’imaginait que les mannequins passaient leur temps à présenter de nouveaux vêtements, à sortir le soir faire la fête, à rencontrer de nombreuses stars, à se faire photographier à longueur de journée… Bref, une vie de folie – qui ne l’attirait certes pas, mais qui l’intéressait toujours. Et voilà qu’elle en rencontrait un, solitaire, qui aimait lire et qui, selon ses propos, n’était pas trop du genre à sortir. Erika se mordilla négligemment la lèvre, étonnée. Elle ne s’imaginait absolument pas qu’un mannequin puisse être ainsi.

« Ça doit être très intéressant, en tout cas. Et passionnant ! »

Au fond, Erika ne connaissait strictement rien à sa vie, mais elle préféra éviter les conclusions trop hâtives. Peut-être que ce métier plaisait à Stan, peut-être pas. Ça n’avait pas beaucoup d’importance à ses yeux. Mais tout de même, il était mannequin ! Etait-il déjà passé à la télévision ? Avait-il déjà posé pour des marques très connues ? Elle n’osa pas demander pour ne pas paraître trop enthousiaste non plus. Après tout, ils ne s’étaient rencontrés que quelques instants plus tôt…

La conversation se tourna ensuite vers elle. Elle réfléchit longuement à la question de Stan, excellente soit-dit en passant. Oui, que voulait-elle faire plus tard ?

« Je n’ai pas encore une idée très précise », avoua-t-elle finalement. « La seule chose dont je suis sûre, c’est que je veux faire des études. Peut-être en droit, comme ma sœur, ou en psychologie… Je ne sais pas. J’ai peur de me lancer dans quelque chose qui ne me plairait pas, alors pour l’instant… j’évite de trop me projeter. »

Erika se surprit à penser que ses propos n’étaient pas des plus cohérents. Elle avait hâte de quitter le lycée pour enfin « voler de ses propres ailes », mais dans un même temps, elle ne savait toujours pas où aller après, que faire, et préférait ne pas (trop) y penser. L’année venait de commencer, elle aurait tout le temps d’y songer d’ici quelques mois !

Stan ne peut s'empêcher de rire face à la réaction d'Erika en apprenant qu'il est mannequin. Les gens sont souvent un peu surpris, mais jamais à ce point. Il sait pas trop comment le prendre, est-ce qu'elle trouve cela étonnant parce qu'il est moche ?! Finalement même si c'était le cas, Stan ne le prendrait pas mal, il est ouvert à la critique et comprendrait parfaitement que certains n'aiment pas ce qu'il fait, ou n'aiment tout simplement pas son physique...

Et oui ! Confirme-t-il tout de même, avant qu'elle lui pose une nouvelle question.

C'est vrai que j'ai l'occasion de voyager un peu avec ce boulot, et je rencontre des personnes connues dans le milieu parfois. Mais je suis pas super connu donc je fais pas non plus des trucs de fous à chaque contrat.

Explique le grand brun en toute honnêteté. Il n'est pas un de ces tops models qui tournent à l'internationale, et cela ne lui fait pas vraiment envie non plus en fait. Il a tant qu'assez de déplacements professionnels à son goût actuellement. Car même s'il est trop modeste pour s'en venter, il a déjà eu des contrats qui l'ont fait apparaitre dans des pubs ou des magazines au niveau national.

Pour ceux qui aime la mode en tout cas ouais.

Acquiesce le mannequin, quand Erika suppose que son métier doit être passionnant. Il omet volontairement de préciser qu'il ne fait pas partie de ces personnes, passionnés du domaine. Lui il n'aime pas vraiment ça, et s'il était doué pour autre chose, il aurait aimé bosser dans un autre domaine en fait... Mais bon, il n'a pas envie d'entrer dans un débat à ce sujet ni d'étaler sa vie à cette fille qu'il connait à peine.

D'accord ! T'as encore le temps d'y penser de toute façon. Et puis, dans le pire des cas si tu te trompes d'orientation, c'est juste une année au final, c'est pas très grave...

Fait-il remarquer dans un sourire amical. Elle a raison selon lui de faire des études si elle a le niveau scolaire pour, ça lui ouvrira forcement plus de portes par la suite, et lui permettra d'avoir un boulot interessant, qui lui plait !

Au plus grand étonnement d’Erika, Stan lui explique rapidement quelques points de sa vie de mannequin avec un manque d’entrain évident. Cela la surprit, elle qui était intimement persuadée que tous les mannequins adoraient leur job et ne le quitteraient pour rien au monde. Certes, elle n’aurait pas voulu faire ce métier. D’une part parce qu’elle était bien trop petite, mais aussi parce que la pression était bien trop forte. Mais pourquoi se lancer dans cette carrière en sachant pertinemment qu’elle ne nous plairait pas ?

Aux yeux d’Erika, Stan dégageait une singulière aura, sans être toutefois particulièrement beau – mais ce n’était là que son avis personnel. Elle voulait le connaître ; le comprendre aussi. L’adolescente considérait que tous les garçons étaient pareils : dotés d’un inégalable machisme, d’une arrogance rare, qui se livraient perpétuellement un combat de coqs. Cela l’intriguait que Stan puisse aimer la solitude, la lecture, et probablement d’autres choses qu’elle ignorait encore.

« Pourquoi ? » s’enquit-elle de but en blanc. « Si la mode, c’est pas ton truc, pourquoi avoir voulu bosser dans ce milieu ? »

Ce n’était peut-être pas la question la plus fine possible, mais c’était plus fort qu’elle. Au moins, son sourire angélique et rassurant atténuait le côté direct de son interrogation. Et puis, songea Erika en silence, c’était une question tout à fait légitime. Il était rare de rencontrer un mannequin, qui plus est qui ne ressemblait absolument pas à l’idée que s’en faisait la jeune fille. Autant en profiter, elle ignorait quand elle pourrait le recroiser une fois son départ. Enfin, elle espérait qu’il ne prendrait pas mal sa curiosité légendaire !

Elle songea ensuite à sa propre vie, ses propres études. Il avait raison, bien sûr, mais rater une année complète d’études seulement parce qu’elle s’était trompée de voie lui paraissait tellement saugrenu qu’elle refusait même d’y penser. Son plus grand rêve était d’obtenir un poste haut placé, à responsabilités, qui lui permettrait de s’épanouir. Si elle était incapable de gérer sa vie amoureuse, au moins, elle pourrait gérer sa vie professionnelle. Et elle aurait une excuse si jamais on la questionnait au sujet de ses relations amoureuses. Elle n’aurait qu’à rétorquer « le travail avant tout ». Fin de l’histoire.

« Oui, probablement. J’ai encore le temps d’y réfléchir. Au fait, tu vas venir à la collecte de fonds organisée par la ville ? Il y a des affiches partout. J’ai hésité, mais… c’est pour la bonne cause, pour Great Falls. Ça va me plaire je pense. Et toi ? »

Elle venait de penser à ce détail-là, et se demandait franchement si son interlocuteur viendrait ou non à une soirée qui devait rassembler autant d’habitants de la ville.

Comme souvent, quand Stan apprend à quelqu'un qu'il est mannequin, son métier occupe la conversation un petit moment, malheureusement. Il n'aime pas tellement parler de son métier, parce qu'il a du mal à cacher qu'il n'aime pas vraiment ça... D'ailleurs Erika semble le deviner malgré ses efforts et l'interroge à ce sujet.

C'est... compliqué.

Répond il en esquissant un sourire, pas très à l'aise. Il n'a rien contre la blondinette, au contraire même le courant passe plutôt bien entre eux, mais il n'a pas envie de lui raconter sa vie, son passé. Et pour répondre honnêtement à sa question, il serait obligé de le faire... Il faut vraiment qu'il ait confiance en la personne si elle veut espérer entendre le mannequin se confier, et cette fille il la connait à peine finalement. Il espère cependant qu'elle ne se vexera pas pour cela, ce serait dommage.

Le grand brun préfère amplement entendre Erika parler d'elle, et apprendre à la connaitre davantage. Elle est encore lycéenne, et ne sait visiblement pas encore vers quelles études elle se tournera. C'est sans doute normal à son âge. Ils passent finalement à un autre sujet, la fête organisée prochainement pour récolter des fonds pour la ville.

Je pense que j'y ferais un tour oui. Au moins pour venir applaudir une amie à moi qui sera sur scène.

Lui fait-il savoir dans un sourire. Candice lui a dit l'autre jour qu'elle devrait y chanter, et forcément il a envie d'aller la voir. Il ne l'a jamais entendu en concert comme ça, c'est l'occasion !

T'y vas aussi du coup je suppose ? C'est sympa en général les fêtes qui réunissent tout Great Falls comme ça.

Stan n'est pas très branché fêtes à la base, mais il a tout de même eu l'occasion de se rendre à plusieurs soirées organisées depuis qu'il vit ici, et c'est souvent une réussite ! Alors même si pour celle ci, ce n'est pas la mairie qui organise, il espère que ce sera réussi. En plus, comme l'a fait remarquer Erika, c'est pour la bonne cause, et puisqu'il aime cette ville, Stan a naturellement envie d'aider à sa reconstruction.

Erika arqua un sourcil, légèrement surprise face à sa réponse pour le moins brève. Certes, elle ne s’attendait pas à grand-chose d’autre, sachant pertinemment qu’ils se connaissaient à peine et qu’il était rare que quelqu’un se confie au premier inconnu venu. Il n’empêche que, « c’est compliqué » représentait aux yeux de l’adolescente la réponse de facilité. Elle sourit malgré tout, attendrie. Ce n’était pas grave, dans le fond. Ce qu’elle désirait seulement, c’était en apprendre un peu plus sur son interlocuteur. Rien de très important.

« D’accord. Oui… Oui, j’y vais. Je ne pourrais manquer ça pour rien au monde ! Sauf évidemment si j’ai un devoir ou un truc du genre… »

Elle sourit de nouveau. Sourire rapidement envolé à la perspective d’une énième dissertation à rédiger. Parfois, elle s’en voulait de bosser ainsi, parce qu’elle avait l’étrange sensation de rater son adolescence, avec toutes ses joies et ses peines. Et puis elle se ressaisissait. Au nom de son avenir. Elle jeta un coup d’œil à son livre puis le glissa machinalement dans son sac. Elle avait perdu toute motivation pour se livrer à une telle activité.

« D’ailleurs, je ne vais pas trop tarder, je viens de me rappeler que j’ai un devoir de littérature anglaise à rendre bientôt, je voudrais bien le boucler rapidement… De toute façon, on se verra à la soirée ».

Elle ne voulut pas partir comme une voleuse et préféra attendre la réponse de son interlocuteur. La jeune fille en profita pour se relever, vérifia qu’elle n’avait pas mis de l’herbe partout sur ses affaires, et se tourna enfin vers lui, avec un peu plus d’assurance qu’auparavant. Il était l’un des premiers garçons inconnus à qui elle s’adressait sans bégayer, simplement parce qu’il était différent de tous ceux qu’elle avait bien pu connaître.

« J’espère qu’on se verra », renchérit-elle avec un sourire malicieux, qui ferait fondre n'importe qui.

Lorsqu’Erika l’interroge, Stan aurait pu donner un semblant d’explication, même s’il n’avait pas envie de confier les détails de sa vie à cette presque inconnue... Mais il se contente d’esquiver en lui donnant une réponse bateau, qui traduit sans doute sa réticence à parler de ce sujet. A quoi bon lui parler de ses motivations, ou plutôt sa non motivation à faire son métier ? C’est personnel, et ça n’a pas vraiment d’interet de le lui raconter de toute manière, qu’il entre dans les détails ou non.

Ils changent ensuite de sujet, ce qui convient très bien au mannequin. Il apprend que la demoiselle se rendra elle aussi à la collecte de dons. Peut être qu’ils se croiseront là bas ? Cette idée ne dérange pas le grand brun en tout cas, au contraire.

D’accord. Oui on s’y croisera sans doute.

Acquiesce le mannequin dans un sourire, comprenant parfaitement qu’Erika ait d’autres choses à faire que rester tout l’après-midi ici. Ce n’est pas bien grave de toute façon, ils se reverront certainement à un moment ou un autre ! L’avantage de Great Falls. Un sourire éclaire à nouveau son visage en voyant celui qui lui adressait la blondinette.

Moi aussi. Répond-il sincèrement.

Bon courage pour ton devoir.

Ajoute Stan avant que la demoiselle s’en aille. Il ne s’attendait pas à faire une rencontre aujourd’hui, mais il est finalement heureux que ce soit le cas. Ce n’est pas si souvent qu’il peut discuter avec des gens qui ont des centres d’interet communs aux siens.

FIN DE LA SCENE.